Youma est un empirique. Il ne croit que ce qu’il voit. Ou plutôt, ce qu’il peut analyser par tous les moyens à sa disposition. Sa vision du monde est froide, et ne laisse pas de la place à la magie. Tout a une explication, et un mode de fonctionnement. Qu’on ne sache pas veut juste dire qu’on n’a pas les outils pour le comprendre, et qu’il faut justement chercher ces outils. Et pourtant, à un moment de sa vie, il a bien fallu chercher à expliquer le hasard. C’est à ce moment qu’il a comblé la lacune qu’il lui manquait dans son explication du monde qui l’entourait : par l’astrologie. Une journée de merde ? C’est parce que les rats sont censés en avoir une aujourd’hui. Ce qu’il y a de magnifique avec l’astrologie, c’est qu’elle tombe toujours juste d’une certaine façon. Essayez de le contredire si vous le souhaitez, mais c’est un débat sans fin et vous finirez par être à court de preuves contre sa solide expérience sur le sujet. Ou alors, vous en aurez marre, plus probablement. Autant, il faisait partie des élèves qui disséquaient les grenouilles sans hésiter, autant c’était à des fins scientifiques. S’il est calculateur, il n’est pas du tout manipulateur. Et ne possède aucune once de méchanceté. Malgré son physique, et ses somme toute bonnes aptitudes au combat, il n’est d’ailleurs pas du tout quelqu’un d’agressif. Si on n’oublie pas qu’on est avec quelqu’un qui n’aime pas l’inconnu et a besoin de réponses, et dont le sérieux ne prête pas toujours au rire et à la chanson, on peut même le trouver d’agréable compagnie. Surtout qu’il a toujours plein d’anecdotes à sortir sur tout ce qu’il voit, ce qui peut même aller jusqu’à animer une conversation. Et bien que son sens de l’humour laisse parfois à désirer, il n’en est pas non plus dénué. Youma est né au sein de l’Empire, et cette nation a toujours été un havre sympathique pour ses recherches et ses expériences. Bien que les plus vieux membres du clan se considèrent encore, parfois, comme des membres d’une nation conquise, ce n’est pas son cas. Puisque l’Empire a apporté la paix et le confort de vie à un pays qui jusqu’ici ne l’avait pas, pourquoi ne finiraient-ils pas par l’accepter, après tout ? A tous points de vue, leur situation est meilleure que celle d’avant. Et en plus, on leur a laissé une identité, et aucun habitant ou clan n’a été mal traité suite à la défaite, s’il n’opposait pas de résistance. Le projet de l’Empire parait censé à Youma, et s’il peut réussir, il sera plus que ravi d’y apporter sa contribution. Il voit la guerre comme un obstacle à sa tranquillité, et souhaite qu’elle s’arrête. Encore une fois, si sa participation peut avoir une influence positive sur son déroulement, il s’attèlera à la tâche. Mais il n’est pas du genre à foncer en première ligne pour le plaisir. Hormis cette ligne de vie simple, et sa curiosité, il n’a pas de but ultime à proprement parler. Se perfectionner soi-même, comprendre le monde qui l’entoure. Ce sont déjà des buts suffisamment difficiles à atteindre, en soi. Youma a une sainte horreur de la musique, et de tout ce qui est inutilement bruyant en général. Il aime le calme, et avoir de la place pour réfléchir.
Pour quelqu’un qui fréquente les laboratoires, et encore plus pour un membre du clan Sengoku, Youma n’a pas le physique le plus logique. Il est grand, dépassant légèrement le mètre quatre-vingt, et étonnement athlétique. Entre cette carrure plus imposante que ses confrères, ses cheveux bariolés, ou même les tatouages qui ornent la partie droite de son buste et son bras droit, il se fait contrôler à chaque fois qu’il passe la moindre porte du bâtiment scientifique. Surtout qu’il est encore nouveau d’à peine deux ou trois semaines, et que tout le monde ne connait pas son visage, loin de là ! Pour sa chevelure qui peut paraître très fantaisiste, et étonnante pour quelqu’un qui ne se préoccupe pas réellement du physique, figurez-vous qu’elle est totalement naturelle ! En fait, tous les membres du clan Sengoku ont des cheveux du même genre, avec des couleurs totalement loufoques. Le cyan de Youma est presque un tirage ‘sympathique’ comparé à certains autres. Pour l’anecdote, cela date d’une époque où un Sengoku a tenté une transmutation à l’échelle de la famille entière, et il s’est bien raté. Leur génome entier a été modifié, et depuis tous les membres de la famille ont ce trait physique caractéristique et ils n’ont jamais pu faire quoi que ce soit contre ça. Les yeux jaunes, c’est une autre époque, et une autre bêtise, mais là aussi on tombe dans les expériences familiales qui ont mal tournées … Toujours est-il que les traits Sengoku associés à sa carrure font de lui quelqu’un de naturellement intimidant, ce qui peut paraître un peu étonnant quand on apprend à connaître le personnage. Youma porte le bandeau qui prouve son appartenance aux forces ninjas au niveau de l’épaule, et il est amusant de noter que le sien n’est jamais vraiment constitué de la même matière. Le tissu demeure intact, mais la plaque qui est accrochée a tendance à devenir du plastique, du verre, ou des matériaux hybrides assez étranges, selon les jours. Transmuter son propre bandeau étant un de ses tocs lorsqu’il est aux prises avec un problème dur à résoudre, et qu’il réfléchit. Outre cela, on peut aussi retrouver une autre caractéristique très shinobi chez lui : la lourde chaine de fer qu’il enroule comme une corde à la droite de sa ceinture. Il ne se sépare jamais, également, de son sac à dos, dans lequel il fourre toujours un tas de matériaux de récup, mais aussi du bric-à-brac scientifique, son téléphone, des vivres, et bien sûr le magazine d’astrologie du jour, fraîchement récupéré au kiosque au coin de sa rue.Le dos de sa veste est orné du symbole du clan Sengoku (un pentacle complexe, ficelé de symboles, et notamment de celui des cinq éléments primordiaux, dont les lignes s’entrecroisent d’une manière qui parait totalement incompréhensible à quelqu’un qui n’est pas du clan).
Pour parler de Youma, il faut avant tout parler du clan Sengoku. C’était l’un des quatre clans fondateurs du pays de la cascade. Le clan des alchimistes, spécialistes des transmutations. Contrairement aux autres clans, lorsque la guerre avec un empire naissant a été déclarée, le clan Sengoku a refusé de participer. L’Empire proposant à la base une coalition, et une fusion de leurs territoires, en des termes raisonnables et avantageux pour le pays de la cascade, les alchimistes n’ont pas cautionné la réaction des autres clans et se sont retirés du conflit. A la défaite du pays de la cascade, ils n’ont cependant rien revendiqués auprès de l’Empire. Tout ce qu’ils ont voulu et ce qu’ils veulent toujours, c’était de mettre au point de nouvelles transmutations, toujours plus grandioses, et participer à l’avancée scientifique du monde. Jugés pour la plupart comme des savants fous, ils sont tout de même reconnus pour leurs compétences uniques, et pour posséder un grand nombre de connaissance sur la structure de chaque chose qui compose l’univers. Leur capacité de pouvoir changer ces structures est également une source de respect, même auprès des clans majeurs, aussi même si certains utilisent le sobriquet ‘d’alchimistes’ avec une certaine moquerie, personne n’a jamais remis en question leurs réelles capacités. Le clan n’est composé que d’une dizaine de personnes, réparties dans plusieurs branches familiales composées en grande majorité de civiles. En effet, les techniques des Sengokus nécessitent une affinité avec les cinq éléments primordiaux, qui se transmet difficilement même en descendance directe, et donc un enfant sur dix la possède. Youma faisait partie de ceux-là. Véritable fierté de ses parents, et quatrième enfant d’un ensemble de quatre frères, dont les trois autres ont toujours été très jaloux de lui. Le garçon n’a jamais vraiment essayé de résoudre ce conflit, préférant s’abreuver de savoir et de curiosité, plutôt que de tenter de raisonner ceux qu’ils appellent les ‘imbéciles’. Non pas qu’il les considère comme inférieurs à cause du fait qu’ils n’aient pas l’affinité quintuple. Il les considère comme inférieurs parce qu’ils sont faibles et stupides, et n’ont jamais tenté de faire au mieux avec ce qu’ils avaient, préférant envier ce qu’ils n’avaient pas. Dans la famille directe du garçon, seul sa grand-mère possédait l’affinité, comme lui. Ce fut elle qui se chargea, donc, de son éducation. Comme elle habitait dans un petit village des plaines arc-en-ciel (elle préférait la campagne), l’essentiel de l’enfance et de l’adolescence de Youma se passèrent là-bas. La campagne lui plait encore énormément à l’heure d’aujourd’hui. Si tout le matériel dont il a besoin n’était pas en ville, il y serait d’ailleurs volontiers retourné. La ville est tellement bruyante ! Et les lumières de la nuit couvrent les étoiles : il est obligé de sortir de la ville pour pouvoir les voir. Ce qui a tendance à l’agacer. Comme la plupart des membres de son clan qui disposent de l’affinité, Youma a fini par revenir au pays de la cascade. Et de là, il a commencé à passer son temps enfermé pour travailler en laboratoire, que ce soit celui des Sengokus ou celui de la Scientifique. Un scientifique civil, en somme, ce que sont les membres du clan en règle générale. Mais le monde tout entier change en permanence autour d’eux. Et en restant tout le temps enfermé, loin de la planète dont ils foulaient le sol, comment pouvaient-ils ressentir ces transformations, et s’y adapter ? Le pouvoir de changer le monde, par la transmutation, ne serait à jamais qu’un rêve s’ils restaient enfermés ! Il fallait comprendre la façon dont il changeait déjà en l’analysant, en se rendant sur place, en explorant ses mystères, plutôt qu’en restant enfermé à relever des données. Les données sont primordiales, mais n’ont aucune valeur si elles ne sont pas étayées par de la créativité, et la créativité dans un laboratoire est inutile puisqu’elle ne fait qu’embrouiller l’esprit. Là où elle est utile, c’était au-dehors !Youma eut une violente dispute avec son supérieur Sengoku sur le sujet, et se retrouva dos au mur : il rentrerait dans les rangs, ou retournerait à la campagne, pour expérimenter sur des moutons l’art de transmuter la laine en beurre. Il choisit plutôt son unique option qui le propulserait instantanément un grade au-dessus de celui qui l’avait si abruptement menacé : devenir shinobi. Au sein de la scientifique, ils jouissaient d’un rang et de moyens supérieurs aux civils. Il se pointa donc à l’académie, arguant que sa grand-mère lui avait enseigné les techniques shinobis aussi bien que celles de son clan. Et après un test somme toute assez rapide, il fut convenu qu’il pouvait devenir Genin. Bien sûr, il eut deux semaines pour des cours de rattrapage accéléré sur certains sujets. Mais il ressortit bien vite qu’il possédait les aptitudes qu’il fallait. On lui recommanda quand même d’y aller doucement au début : il manquait cruellement d’expérience : même les étudiants avaient déjà des missions de rang D à leur actif, contrairement à lui !Youma a de grands espoirs dans cette nouvelle carrière, surtout depuis qu’il a pu regarder de haut et faire fermer son clapet à l’autre énergumène qui avait menacé d’enfermer ses talents dans une prison qu’il appelait laboratoire. Il avait beau fulminer et rire dans son dos, rirait bien qui rirait le dernier. Lorsqu’il aurait compris comment le monde se transformait au rythme des jours et des saisons, et qu’il contrôlerait cette ultime forme de transmutation, il était certain qu’il rirait beaucoup moins.
